Axe 3
3. Impacts des micro-algues toxiques et nuisibles et transfert des phycotoxines dans les écosystèmes marins
Coordinateurs : Caroline Fabioux, Damien Tran
Equipes impliquées : UMR6539-LEMAR, IUEM, Plouzané; UMR5805-EPOC; IFREMER-PHYC, LER Morbihan-Pays de Loire, LER Languedoc Roussillon / Sète et MARBEC ; LER Bretagne Occidentale / Concarneau, UMR 7093-LOV, LOG CNRS/ULCO/UL1, ILM
Les premiers effets des efflorescences de phytoplancton toxique ont un caractère aigu, lié à la fois au mode d’action des toxines et à la forte concentration des cellules productrices de toxines. Ces efflorescences représentent clairement un stress pour les espèces consommant du phytoplancton, notamment les bivalves filtreurs, consommateurs primaires importants pour la chaîne trophique mais aussi espèces d’intérêt aquacole. Les palourdes, coques, moules, huîtres, coquilles Saint Jacques, et donaces sont particulièrement exposées aux HAB et l’impact sur les stocks de pêches et les cheptels cultivés peut-être important. Les toxines peuvent ainsi être transférées d’une espèce à une autre le long des chaînes trophiques (bioaccumulation, voire biomagnification). Chaque niveau trophique pourra potentiellement être affecté par la toxine qui en provoquant des désordres biologiques pourra même dans certains cas conduire à des mortalités (cas des mammifères et oiseaux contaminés par l’acide domoïque). Or, il existe très peu d’études concernant les effets à long terme d’une bioaccumulation de phycotoxines par les organismes marins. Les informations disponibles sont le plus généralement limitées aux espèces exploitées.
Contrairement aux effets bien répertoriés de certaines phycotoxines sur la santé humaine, les effets sub-létaux de ces efflorescences sur la biologie (comportement, rythmes de vie, croissance, reproduction, immunité) des organismes marins restent encore insuffisamment évalués. Ces expositions aiguës induisent des réponses physiologiques, cellulaires et génétiques, ainsi que des lésions et des pathologies pouvant provoquer la mort des organismes exposés mais certains bivalves ont développé des stratégies et des mécanismes de défense permettant leur survie : fermeture des valves, réduction de la filtration, production de pseudo-fèces (les particules sont captées mais non ingérées). De même, des expositions répétées et/ou continues à des phycotoxines (saxitoxines et ses dérivés notamment) peuvent constituer une pression de sélection, notamment sur les gènes codant les cibles moléculaires des toxines, aboutissant à la sélection naturelle de génotypes résistants à ces phycotoxines, favorisant ainsi leur accumulation à de très hauts niveaux. D’une façon générale, les relations génotype/phénotype d’accumulation des toxines chez les bivalves par exemple sont particulièrement importantes à évaluer au regard de ces éventuelles conséquences en termes de risque sanitaire pour les consommateurs. L’intensité de ces processus diffère en fonction des toxines et des organismes marins, ce qui complique la prédiction du risque d'exposition pour les consommateurs de ces organismes contaminés.
Outre la concentration et la toxicité des micro-algues, la teneur en toxines des organismes marins et leur temps de rétention est fonction de plusieurs paramètres biologiques : i) les taux de filtration, de consommation, et d’absorption de ces micro-algues pour les consommateurs primaires ou de proies déjà contaminées pour les consommateurs secondaires et, ii) l’état physiologique des animaux exposés (e.g. métabolisme, reproduction, ploïdie, comportement), iii) les cinétiques de bioaccumulation, biotransformation et élimination des toxines (Shumway, 1990). Ainsi, la prédiction du risque d'exposition pour les consommateurs de ces organismes contaminés est complexe car le niveau de toxines accumulées dans les animaux est multiparamétrique. Des modélisations mathématiques des processus de bioaccumulation des phycotoxines de type DEB (Dynamic Energy Budget), prenant en compte tous les paramètres cités ci-dessus sont actuellement explorées et sont clairement prometteuses. A terme, ces modèles à l’échelle individuelle et populationnelle pourront être couplés en amont avec les modèles écosystémiques (cf Axe 2) et en aval avec ceux pour l’appréciation quantitative du risque pour le consommateur (cf Axe 4). Par ailleurs, dans cet axe nous nous proposons de développer un outil de surveillance précoce de la présence des efflorescences toxiques utilisant la réponse comportementale des bivalves filtreurs. Cet outil, la valvométrie, a déjà été testé en laboratoire avec succès sur l’espèce A. minutum avec des réponses spécifiques comportementales des huitres et palourdes. Nous projetons dorénavant d’appliquer cet outil en conditions réelles d’efflorescences in situ. Le but à terme est de mettre au point un outil d’alerte précoce pour les professionnels et les administrations.
Ce GDR nous permettra la mutualisation des compétences spécifiques des équipes de recherche dans les axes suivants pour mener à bien les objectifs de l’axe 3:
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Evaluer l’impact écotoxicologique des micro-algues toxiques et nuisibles (dont les espèces ichtyotoxiques) et de leurs différentes toxines sur les organismes marins (physiologie, les rythmes biologiques, le cycle de vie et l’alternance de la reproduction clonale et sexuée, croissance etc.), d’intérêt commercial (issues de la pêche et de l’aquaculture), et/ou d’intérêt écosystèmique (mammifères mains, zooplancton, etc) suite à des expositions directes ou par bioaccumulation.
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Evaluer les transferts de toxines le long de la chaîne trophique
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Evaluer l’impact des micro-algues toxiques et nuisibles et de leurs différentes toxines sur le fonctionnement des écosystèmes.
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Détection des efflorescences toxiques in situ par bio monitoring (valvométrie) des organismes sentinelles (bivalves…) couplés à des algorithmes mathématiques performants.